Mohamed Said Beghoul, expert en hydrocarbures: “Le Forum des pays exportateurs du gaz ne défend pas la politique des prix”

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Mohamed Said Beghoul est expert en exploration et en développement du gaz et du pétrole. Il gère le cabinet Begoil Consult, installé à Boumerdes. Il revient sur les enjeux du 7ème Forum des pays exportateurs du gaz (Gas Exporting Countries Forum, GECF) qui s’ouvre en Algérie ce jeudi 29 février 2024 et qui se poursuit jusqu’au 2 mars, au Centre international des conférence (CIC) Abdellatif Rahal, à Club des Pins, à l’Ouest d’Alger. Le GECF est composé de 12 pays membres permanents et de 7 non permanents.

Quels sont les enjeux du 7ème Forum des pays exportateurs du gaz qui s’ouvre ce jeudi 29 février en 2024 à Alger ?

C’est une réunion ordinaire. Le Forum se tient tous les deux ans dans un pays membre. Les Etats exportateurs du gaz vont mettre à jour leurs points de vue en prenant en compte ce qui a été réalisé pendant deux ans. Ils vont discuter sur la base de la collecte d’informations et se mettre d’accord sur le marché gazier, son évolution et les mesures à prendre pour défendre les intérêts nationaux de chaque pays. Il faut noter que le GECF n’est pas l’OPEP (Organisation des pays exportateurs du pétrole). Il défend le gaz en tant que source d’énergie mais le profit revient à chaque pays membre. Le GECF d’Alger ne sortira pas avec des recommandations sur les prix ou sur le niveau de production. Le statut du Forum mentionne que les pays n’ont pas de quotas de production. Ils ne peuvent décider ni de l’augmentation ni de la baisse de la production. Chaque pays est libre de sa politique en la matière.

La réunion d’Alger va donc être se dérouler sur des thématiques précises

Il y a aura, par exemple,  un échange d’expériences sur la limitation du torchage du gaz à effet de serre, sur la séquestration et la capture du gaz…Le Forum du gaz ne défend pas la politique des prix

Quelle est la place de l’Algérie dans ce Forum ? Et quelles sont les capacités actuelles de production de l’Algérie ?

L’Algérie est un producteur moyen. Nous produisons annuellement près de 135 milliards de mètres cubes. 100 milliards de mètres cube sont commercialisés dont 50 % exportés et 35 milliards de mètres cube sont réinjectés dans les gisements gaziers. En Afrique, l’Algérie est parmi les premiers producteurs du gaz dont le GNL (Gaz naturel liquéfié). Les réserves du Nigéria sont plus importantes, plus de 5000 milliards de mètres cubes.

Qu’en est-il des réserves de l’Algérie en gaz ?

Les réserves actuelles de l’Algérie sont estimées à 2300 mètres cubes. Les avantages de l’Algérie sont liés à son expérience et à ses infrastructures. L’Algérie est un pays pivot qui peut jouer un rôle dans le domaine des idées, des orientations, du conseil même au sein du Forum sur le gaz naturel.

Quelles sont les perspectives de la production du gaz naturel en Algérie ?

L’Algérie a les moyens d’augmenter sa production du gaz naturel. Le top que nous avons atteint était de 154 milliards de mètres cubes en 2008. Depuis cette date, la production a baissé. Une production qui peut repartir à la hausse avec l’arrivée de réserves additives. La production est liée aux réserves.

Quel est le niveau de la demande interne en gaz ?

En Algérie, on consomme actuellement presque 50 milliards de mètres cubes en moyenne par an. Chaque année, cette demande augmente de 7 à 8 %. Nous avons donc intérêt à trouver d’autres réserves de gaz pour répondre aux besoins de la population. Il est évident que la consommation interne passe avant l’exportation.

Les réserves de l’Algérie en gaz de schiste sont-elles importantes ?

D’après des études faites, en 2015, sur une cinquantaine de pays par une société américaine spécialisée dans le domaine, l’Algérie est classée troisième au niveau mondial avec des réserves de 20.000 milliards de mètres cube, c’est à dire dix fois de ce que nous avons aujourd’hui en termes de réserves de gaz naturel. Le gaz de schiste n’est ni évalué ni exploité en Algérie.
Sonatrach travaille avec les institutions spécialisées dans le domaine minier algérien sur le potentiel des ressources non conventionnelles d’énergie. Il s’agit de bien connaître le potentiel exact. Le chiffre de 20.000 milliards de mètres cubes a été établi par les américains. A nous de faire des évaluations, d’avoir nos propres données. Peut-être que ce potentiel est plus ou moins important. Nous devons le savoir. Ce qui est sûr est que les réserves de gaz de schiste sont importantes en Algérie.

Pensez-vous qu’il existe des réticences pour exploiter ces ressources non conventionnelles ?

Les réticences sont écologiques. Il y a une crainte de la contamination de la nappe aquifère. Les avis sont partagés sur cette question . Les américains ont fait beaucoup de progrès techniques pour respecter l’environnement lors de l’exploitation du gaz de schiste.

Pensez-vous qu’il n’existe pas de risques écologiques liés à l’exploitation du gaz de schiste en Algérie ?

Je pense qu’il n’existe pas de risques contrairement à ce qui est répandu. Ce qui peut exister ne signifie pas la fin du monde. L’Etat décidera un jour d’exploiter le gaz de schiste. Les structures de Sonatrach y travaillent actuellement. Le dossier n’est pas sur la table mais dans les tiroirs. Cela dit, il existe un problème relatif à la rentabilité économique du gaz de schiste. Cette ressource n’est pas encore rentable. Il faut une stabilité des prix pendant trois à quatre ans sur le marché pour pouvoir évaluer la rentabilité et prévoir la production, etc. Le gaz de schiste est difficile, consomme beaucoup d’argent. Les pertes étaient sèches lors du début de l’exploitation de ce gaz aux Etat Unis en 2008, certaines sociétés ont abandonné leurs projets. Avec la recherche et l’innovation, les américains ont réduit les coûts de 40 %. Aujourd’hui, ils sont plus à l’aise aujourd’hui.

L’Algérie est-elle prête techniquement à exploiter le gaz de schiste ?

Oui. Il n’existe aucun problème technique. Nous n’avons pas une technologie algérienne, mais universelle. Comme celle utilisée pour le gaz naturel à Hassi R’mel. Mais, les Algériens ont beaucoup d’expériences dans le domaine du gaz.



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