Première conférence-débat de l’an 2024 de l’Académie Algérienne des Sciences et des Technologies (AAST), sur les 12 prévues, nombre appelé à varier en fonction des conjonctures. Hasard calendaire, c’est « Tremblements de terre en Algérie, Evaluation du Risque Sismique et Impact sur le Développement Social et Economique », par le professeur Mustapha Maghraoui, qui a été retenu, coïncidant avec la commémoration du séisme de Turquie survenu le 6 février 2023. Le Palais de la Culture Moufdi-Zakaria est lieu des débats, alors que 17 heures comme horaire, s’inscrit dans le souci de l’AAST de redonner vie à la capitale en post-travail.
Sommes-nous prémunis contre une catastrophe sismique en Algérie ?
C’est à cette question primordiale qu’en tant qu’expert et à titre préventif et de conseil scientifique, que le Professeur Mustapha Meghraoui répondra dans le cadre de ses activités de recherche et d’analyse des risques majeurs au sein de l’Académie algérienne des sciences et des technologies.
« Le nord de l’Algérie a subi plusieurs catastrophes sismiques au cours du temps, dues essentiellement à notre proximité de la limite des plaques tectoniques Afrique – Eurasia. », lance d’emblée, détaillant : « L’Algérie a enregistré, de 1954 à 2022, 19 séismes faisant 6 483 morts et 1 387 704 blessés. Quant aux pertes économiques, elles sont estimées à plus de 10 milliards de dollars, dont 3 milliards de dollars pour le seul séisme de Boumerdes, le 21 mai 2003. »
Pr Mustapha Meghraoui, se veut précis : « Nous avons eu deux séismes à El Asnam et non un seul. », ajoutant : « une faille terrestre a même été détectée en 1977, soit trois avant le tremblement de terre d’El Asnam. »
Au sujet de la réglementation parasismique algérienne (RPA) 1999-2003, il dit : « Vraiment c’est une catastrophe, heureusement que celle qui sera prête en 2024 sauvera la face. »
Implication des assurances et de la société civile
Tout en louant les efforts de l’Etat algérien à prendre en charge les cas induits par les séismes (familles sinistrées, personnes blessées, infrastructures endommagées), le Pr Meghraoui en appelle à une meilleure implication des sociétés d’assurance, en ces termes: « il faut que les sociétés d’assurances jouent leur rôle en soutien à l’État dans la prise en charge des sinistres des séismes. »
Enfin, il recommande de « promouvoir un programme d’éducation sur la dissémination de la culture de risque sismique dans la société civile. »
Reconnaissance posthume
Pr Mustapha Meghraoui, a tenu également à rendre hommage à deux qu’ils considèrent comme ses références académiques :
- Pr Hadj Benhallou : mort à l’âge de 74 ans, le 16 octobre 2011 ;
- Dre Assia Harbi, (mère de l’enseignement sismique, selon ses propos), décédée le 19 juin 2021, agée de 57 ans.
Aussi, un hommage-posthume a été réservé aux Professeurs, membres fondateurs de l’AAST :
- Mouloud Tribèche : décédé le 13 décembre 2017 ;
- Abdelkader Khelladi : mort le 6 janvier 2021, âgé de 76 ans) ;
- Ahmed Yamani : décédé le 25 juillet 2021, à l’âge de 64 ans.
La faille de Thénia
Enfin de compte, sommes-nous prémunis contre une catastrophe sismique en Algérie ? Pas tout à fait : la réponse dans le rappel d’un représentant du Centre de Recherche en Astronomie Astrophysique et Géophysique (CRAAG) : « On n’a pas encore résolu la problématique de la faille terrestre sur 50 kilomètres, à Thénia, wilaya de Boumerdes. », précisant : « La faille demeure une entrave pour le développement local de la région, freinant le lancement de beaucoup de chantiers de réalisation. »
A rappeler que les séismes d’El Asnam du 10 octobre 1980 (M 7,3) et de Boumerdes-Zemmouri du 21 mai 2003 (M 6,8) étant les plus forts enregistrés. D’autres séismes historiques destructeurs ont touché l’ensemble des régions:
- du Tell Atlas,
- des Hautes Plaines de l’Est,
- du Sahara Atlas.
Pr Mustapha Meghraoui : en quelques lignes
Le Professeur Mustapha Meghraoui est membre fondateur de l’Académie algérienne des sciences et des technologies, il est l’un des 6 chercheurs et académiciens de la diaspora, sur les 46 composant l’AAST. Il y occupe le poste de Président de la section ’’Sciences de la terre et de l’univers’’. Il est également Professeur émérite à l’Université de Strasbourg en France.
Selon une bio express publiée en préambule à une interview accordée par El Moujahid, l’historique journal public algérien, on y lit : « Il a entamé un parcours de longue durée, en réalisant son mémoire de doctorat sur la sismicité de la région de Chlef, où il est citoyen d’honneur. Il a travaillé sur plusieurs projets internationaux, notamment le projet méditerranéen financé par l’UE, ainsi que des projets dans le Moyen-Orient (Jordanie, Liban, Syrie et Turquie) et en Algérie (Boumerdès). Il a travaillé avec des étudiants de différents pays, tels que l’Algérie, le Liban, la Syrie, la Turquie, le Maroc et le Sénégal. M. Meghraoui est membre de l’Académie algérienne des sciences des technologies et vice-président de la commission séismologique africaine. Il représente souvent l’Algérie, lors de grands symposiums et colloques internationaux. »